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Ilse Koch ou « la Sorcière de Buchenwald » : une femme à la fois perverse et nymphomane


« La sorcière de Buchenwald » ·  ©  Auteur inconnu / U.S. Federal Government
« La sorcière de Buchenwald » ·  ©  Auteur inconnu / U.S. Federal Government

Ilse Koch, surnommée la  « Sorcière » ou la « Chienne de Buchenwald », était l'épouse du commandant du centre de mise à mort de Buchenwald, Karl Otto Koch. En 1938, les nazis décidèrent de construire l'un des plus grands centres de mise à mort, Buchenwald, près de Weimar, en Allemagne. Dès son ouverture, Karl Koch, un officier SS, fut nommé commandant. Il s'y installa avec sa femme et leurs enfants dans une somptueuse villa aux abords du sinistre camp. Contrairement aux autres épouses de SS, Ilse Koch s’impliqua de façon inhabituelle dans l’enfer des prisonniers. Très vite, elle se forgea une réputation de femme sadique et cruelle.



L’ascension sociale de « la Louve SS »


Margarete Ilse Köhler naît le 22 septembre 1906 à Dresde, en Allemagne. Issue d’un milieu populaire, elle suivit des études commerciales avant de rejoindre le NSDAP en 1932 en tant que secrétaire sténotypiste. Destinée à une carrière relativement banale, elle fit, deux ans plus tard, une rencontre qui bouleversa sa vie : celle de son futur mari, Karl Otto Koch. Lorsque ce dernier devint dirigeant du tout nouveau centre de mise à mort de Buchenwald, il lui permit d’accéder à une vie mondaine et à un sentiment de pouvoir absolu. Le couple, corrompu et insatiable, se retrouva alors propulsé au sein de la haute sphère du nazisme. Ils commencèrent à mener un train de vie ostentatoire : villa luxueuse, voitures haut de gamme, repas gastronomiques et soirées libertines. Ilse, réputée pour sa nymphomanie, profita pleinement de cette existence fastueuse. Cependant, ce mode de vie tapageur conduisit le couple à être accusé, en 1943, de détournement de fonds et de meurtres de témoins gênants, un officier SS dont le témoignage aurait pu compromettre Karl Koch. Ilse fut jugée pour complicité devant un tribunal SS, mais elle fut finalement acquittée.



Une mère exemplaire aux fétiches sordides


À la libération de Buchenwald, des témoignages commencèrent à émerger sur les pratiques cruelles et les fétiches abjects d’Ilse Koch. Elle avait notamment pour habitude de se promener à cheval, vêtue de manière provocante, le long des clôtures du camp. Si un prisonnier osait poser son regard sur elle, elle retenait son numéro et le dénonçait à son mari, qui lui infligeait alors des châtiments sévères, comme la schlague et l’isolement en cachot.


Elle nourrissait également une fascination morbide pour les tatouages originaux. Tout prisonnier qui en possédait un était exécuté. Après l'exécution, elle faisait soigneusement prélever la peau tatouée pour en faire des objets tels que des abat-jour et des porte-monnaies.


Quelques restes humains à Buchenwald y compris un abat-jour disparu, en peau humaine selon plusieurs témoignages, et qui n’a pas pu être testé ·  ©   Auteur inconnu / United States Holocaust Memorial Museum
Quelques restes humains à Buchenwald y compris un abat-jour disparu, en peau humaine selon plusieurs témoignages, et qui n’a pas pu être testé ·  ©   Auteur inconnu / United States Holocaust Memorial Museum

Paradoxalement, Ilse Koch était également décrite comme une mère aimante et attentionnée. Des albums photos retrouvés montrent des scènes de joie et de tendresse avec ses enfants, prises au cœur même du camp de la mort.



Jugement et fin de vie


À la fin de la Seconde Guerre mondiale, Ilse Koch fut jugée en 1947 par le Tribunal militaire international de Dachau lors du procès de Buchenwald. Elle fut condamnée à la prison à perpétuité pour sa participation aux atrocités commises dans le camp. Toutefois, faute de preuves suffisantes concernant ses pratiques les plus abominables, certaines accusations ne purent être retenues contre elle. En 1949, les autorités ouest-allemandes souhaitèrent reprendre en main la question des criminels nazis. Cette volonté entraîna, le 17 octobre 1949, la libération d’Ilse Koch, malgré une vive opposition des États-Unis. Cependant, elle fut immédiatement arrêtée de nouveau et jugée une seconde fois. En novembre 1950, son procès s'ouvrit à Augsbourg, où elle fut condamnée à la réclusion à perpétuité pour le meurtre de 135 personnes. Le 1ᵉʳ septembre 1967, Ilse Koch mit fin à ses jours en prison.



De tortionnaire redoutée à icône pop


Dès la fin de la guerre, la presse internationale fit d’Ilse Koch une figure monstrueuse, l’incarnation de l’horreur nazie, la femme du « boucher Koch » Cependant, son image évolua rapidement outre-Atlantique : ses actes furent sexualisés, et son apparence physique fit l’objet de nombreux fantasmes. Peu à peu, le public ne s’intéressa plus à ses crimes, mais à son corps et à ses supposées déviances sexuelles.


Le cinéma et la littérature s’emparèrent du personnage. Dans les années 1950-1970, elle devint une figure de la littérature populaire vendue en kiosque. Puis, à partir des années 1970, elle inspira un genre cinématographique particulier : « le naziporn », où elle était représentée comme une dominatrice sadique et hypersexualisée (Ilsa, la louve des SS en 1974, Ilsa, gardienne du harem en 1976…).


Affiche originale de Ilsa, la louve des SS, 1975  ·  ©  Don Edmonds / Domaine public
Affiche originale de Ilsa, la louve des SS, 1975  ·  ©  Don Edmonds / Domaine public

Dans les années 1980, son cas commença à être traité de manière plus sérieuse dans les études historiques. Plus récemment, son histoire a été instrumentalisée par des groupes négationnistes, ainsi que sur des sites islamistes, antisémites ou néonazis, où la « légende Koch » est utilisée pour remettre en cause la Shoah.



Une femme au cœur des horreurs nazies


Ilse Koch fut une femme sadique, responsable d’actes d’une cruauté inimaginable, et dont la mémoire continue de nourrir de nombreux fantasmes et mythes. Son parcours illustre le fait que les horreurs de la Seconde Guerre mondiale ne furent pas uniquement perpétrées par des hommes, mais aussi par des femmes. Aujourd’hui encore, elle reste une figure emblématique de la barbarie nazie et suscite la fascination et l’horreur dans le monde entier.



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