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Julien Davain

Philippe de Gaulle


Philippe de Gaulle à Amsterdam

L'amiral De Gaulle en 1976 à Amterdam · © Archives nationales néerlandaises


Paris. Il faisait nuit, la capitale française était endormie. Dans le septième arrondissement, le dernier – et officieux – Compagnon de la Libération rendait son dernière souffle. Au petit matin, l’information parvenait aux médias qui s’en emparaient assitôt sous de nombreux formats. C’était le 13 mars 2024, et Philippe de Gaulle s’était éteint à l’âge de 102 ans. En guise d’hommage, retour sur son illustre carrière.


Philippe de Gaulle est né le 28 décembre 1921 à Paris, de Charles de Gaulle et Yvonne Vendroux. Son prénom, il le doit à ses ancêtres, Julien-Philippe de Gaulle, son arrière-grand-père paternel, et Jacques-Philippe Vendroux, son gran-père maternel. A cette époque, les époux De Gaulle auraient pensé à faire du maréchal Pétain le parrain du petit Philippe. Charles de Gaulle était alors assez proche du héros de la Première Guerre mondiale et enseignait à Saint-Cyr. Philippe a alors la chance de connaître ses grands-parents, en particulier son grand-père paternel Henri de Gaulle qui prend soins de lui parler de l’Histoire de France qu’il connaît si bien : Henri était professeur des écoles, passionné par l'Histoire de France et en particulier ce destin français. Il se disait "monarchiste de coeur, mais républicain de raison". Le premier fils du couple De Gaulle précède deux autres enfants : Elisabeth en 1924, puis Anne en 1928. Cette petite fille s'avèrera être trisomique et recueillera l'attention toute particulière de ses parents. Suivant son père dans ses différents déplacements, la famille De Gaulle déménage souvent et les enfants enchaînent les établissements scolaires. Ce n'est qu'en 1934, lorsque de le couple De Gaulle achète une grande demeure au confort très limité, que les enfants trouvent enfin une certaine tranquillité.


D’abord élève de Navale après avoir étudié au collège Stanislas, Philippe de Gaulle devance l’appel de son père et devient le tout premier Français libre, le retrouvant par miracle à Londres. Une fois à Londres, Philippe de Gaulle s’engage expressément dans les Forces navales françaises libres puis apprend l’appel de son père dans les journaux : il apprend alors sa présence à Londres et l’y retrouve accompagné de toute la famille De Gaulle. Charles de Gaulle avait du s'exiler à Londres, s'étant attiré les pires ennuis de la part des élites militaires alors au pouvoir, Philippe Pétain aux premières loges. Madame de Gaulle et ses enfants avaient alors pris un bateau pour fuir un pays abattu après la débâcle française. Malgré les réticences de son père, Philippe de Gaulle prend part aux combats. A bord du cuirassé Courbet, il participe à la bataille d’Angleterre de juillet 1940 à octobre 1940 à Portsmouth. Il intègre ensuite l’Ecole navale de Grande-Bretagne et participe aux campagnes dans l’Atlantique Nord et la Manche.


Son investissement dans la Libération devient total lorsqu’il rejoint la deuxième division blindée de la France Libre en juillet 1942, dirigée par le général Philippe Leclerc de Hauteclocque, en tant que fusilier marin. Il effectue alors les différentes campagnes de la division puis débarque en Normandie en août 1944. Enfin en France ! Mais les réjouissances ne sont qu'éphémères : il faut encore se frayer un chemin pour atteindre Paris et reprendre le contrôle de la France entière. Le 25 août 1944, Paris est à eux ! Le Serment de Koufra n’est pour autant pas encore tenu : il reste encore à faire en sorte que « nos couleurs, nos belles couleurs, [flottent] sur la cathédrale de Strasbourg. ». La deuxième division blindée de la France Libre pénètre finalement dans Strasbourg le 23 novembre 1944, et cette fois, cette fois seulement, la France est à eux.


Par peur d'accusation de népotisme de la part de son père, Philippe de Gaulle n’est pas fait Compagnon de la Libération. Il recueille cependant toute la gratitude de son père, qui lui signale à peu près savoir, au fond de lui, qu'il est bien le premier des Français libres. Après la guerre, il se fait des plus discrets sur la scène nationale, préférant se passionner pour sa carrière dans la Marine nationale. Il devient lieutenant de vaisseau en 1948, capitaine de corvette en 1956, contre-amiral en 1971 et devient enfin amiral en 1980.  En 1947, il s’était fiancé à Henriette de Montalembert, avec qui il eut quatre fils : Charles, Yves, Jean et Pierre. Alors en service, il sert dans les guerres d’Indochine puis d’Algérie. Finalement, sa carrière prend fin en 1982 lorsqu’il est admis à la retraite. Durant cette carrière, il perd subitement son père le 9 novembre 1970, puis sa mère Yvonne de Gaulle le 8 novembre 1979.


Retraité de l’armée mais toujours déterminé à servir, il s’engage en politique et est élu sénateur de Paris le 28 septembre 1986, et ce jusqu’en 2004. Parallèlement, il veille à l’entretien de la mémoire gaullienne en tant que « fils ébloui » comme il aimait dire. Il publie ses Mémoires accessoires en deux tomes de 1997 à 2000, mais c’est l’ouvrage relatant de son entretien avec Michel Tauriac qui reste relativement connu : intitulé De Gaulle mon père, l’ouvrage en deux tomes est publié de 2003 à 2004 et se révèle être un franc succès.


Le temps avançant, Philippe de Gaulle se fait de plus en plus discret. Ce n’est qu’en 2019 qu’il est convié à l’Assemblée nationale pour inaugurer une stèle en son honneur, témoignant de sa libération du Palais Bourbon, institution phare de la République, pour célébrer ce « moment d’histoire ».


C’est un homme de convictions et de valeurs qui s’en est allé, laissant l’héritage gaullien comme illustre mission à ses fils. Pour le meilleur et pour le pire, Philippe de Gaulle était l’éternel « fils de… », ce qui fut l’essence d’une grande frustration tout au long de sa carrière, mais également une mission que de préserver et d’entretenir l’héritage bientôt séculaire de celui à qui l’on doit ce que nous sommes aujourd’hui. Pourtant, Philippe de Gaulle n’a rien à envier à son père : il fut un militaire talentueux, un résistant acharné, « un père formidable et un grand Français », selon les mots de son fils cadet Pierre de Gaulle.


En guise de dernier témoignage, Jean-Luc Barré et la librairie Plon révèlent peu après le décès de l'Amiral les Derniers souvenirs de Philippe de Gaulle. Il y raconte de beaux souvenirs de la Libération, sans oublier quelques précisions et corrections sur la vie de son père.

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